Bonjour, si vous suivez mon blog depuis un certain temps, vous devez savoir que mes relations avec mon fils ne sont pas excellentes. Nicolas d'habite plus avec moi depuis l'âge de 15 ans. Il en a aujourd'hui 47.  Je ne sais pratiquement rien de lui. Et lui, que sait-il de moi ? Cette séparation m'a incité à écrire le blog. J'ai trouvé que ce n'était pas suffisant, j'ai alors commencé à écrire mes mémoires. Un travail titanique quand on ne maîtrise pas l'écriture. J'ai toujours la maxime de Boileau : " vingt fois sur le métier, remettez votre ouvrage". Je cherche à écrire quelque chose de correcte.

Depuis quelques jours, je travaille sur un passage de ma vie difficile. Des années chaotiques. Je ne sais pas quoi dire. En dire trop ou pas assez. Je vous livre la dernière mouture de 7 années de vie de l'âge de 9 ans à 16 ans. Années d'un mauvais rêve où j'ai attendu patiemment qu'il se termine. On n'oublie jamais.

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         Ma vie à Saint Leu la Forêt de 1953 à 1960.
Mes parents on pris la gérance d'un  hôtel-restaurant à Saint Leu en 1953. Pourquoi pas quand on est du métier. Il y avait quand même un bug, mon père était alcoolique et violent avec ma mère.
Il quittait l'usine Guilleminot où il tenait la cantine. Il avait été viré.  Prendre la gérance d'un restaurant était insensé. Après deux ans d'activité, nous avons été expulsé manu militari. Nous n'avions aucun point de chute. Je n'ai rien vu venir. J'avais 11 ans au moment de l'expulsion quand la police est venu avec le déménageur et le serrurier. D'après ma sœur, ma mère pensait  qu'ils n'oseraient pas nous mettre dehors. Elle croyait au père Noël. Je ne sais pas ce que pensait mon père. Il devait rien penser, c'était ma mère qui pensait. Nous nous sommes retrouvés à la rue avec quelques affaires rassemblées à la hâte. Après deux semaines à dormir n'importe comment et n'importe où (deux nuits sur l'herbe devant le restaurant et une dizaine de jours sur une banquette dans la remise d'un restaurant) on nous a proposé une petite chambre de quelques mètres carrés, pour ma mère, ma sœur et moi. Mon père avait trouvé une cave. Je ne comprenais pas ce qui nous arrivait, mais je suivais comme un bon petit soldat. J'avais mon cartable d'écolier avec moi et continuais d'aller à l'école. Le midi nous nous retrouvions dans un café autour d'un sandwich. La petite chambre que nous avons trouvé, était minuscule.
                 La description que je vais en faire, peut vous paraître exagérée. C'est la réalité. Une réalité dont je ne pourrais jamais m'affranchir. Dans la chambre il n'y avait qu'un lit de 1,10 mètre de large, une commode, un porte-manteau fixé sur la porte, un petit balconnet pour y fixer des fleurs, on y accrochait des ustensiles de cuisine. La chambre avait été louée pour ma mère, ma sœur et moi. Trois dans le lit,  tête-bêche. Mon père a rappliqué une semaine après notre installation. Un petit matelas de 50 cm de large était le soir posé au sol  pour mon père. Pendant la journée, nous le roulions, il trouvait se place au pied du lit, un carton Paix avait sa place sur le dessus pour y ranger assiettes et couverts. Le soir, une fois le matelas étendu, il ne restait plus un cm² pour marcher.
Il fallait se coucher obligatoirement. C'est difficile à imaginer, mais c'est encore plus difficile à vivre. Pour faire la cuisine, nous avions acheté un réchaud à alcool à trois pieds. Un truc très dangereux qui n'existe plus,  ou dans un musée. Une fois nous avons bien failli mettre le feu à la chambre. Bien sûr, nous n'avions pas les WC ou l'eau. Nous utilisions un broc et un seau hygiénique. Il fallait descendre 2 étages pour aller chercher de l'eau. Il faut dire que dans les années 50 il y avait un gros problème de logement en France. Le célèbre appel de l'Abbé Pierre sur les mal logés datait de 1954.
Nous avons survécu comme on a pu. A partir de 13 ans, je me suis fait de l'argent de poche en travaillant pour un marchant de légumes et une vendeuse de chemises au marché municipal à côté de mon école. Il me fallait être au marché pour 7 heures précises. J'y étais. Je ne me souviens pas comment je faisais mais j'arrivais à me lever et m'habiller, sans faire ma toilette et sans déjeuner. Il me fallait enjamber mon père qui était encore couché. J'étais content de sortir, de travailler et de voir des gens normaux. Je travaillais un peu plus d'une heure et me rendais ensuite à l'école. A la sortie de l'école, je revenais travailler pour une autre heure. L'instituteur savait ce que je faisais et se moquait un peu de moi. Un fois, il m'a demandé d'écrire au tableau  le nom des légumes que je vendais. Je me souviens, il a été surpris de voir que j'écrivais correctement leur nom.
A 14 ans, après l'échec à mon Certificat d'Etudes, j'ai commencé à travailler dans une imprimerie à Paris. Deux ans plus tard, j'ai trouvé un travail plus intéressant dans une compagnie d'assurances. Je n'y étais pas malheureux mais comme je voulais apprendre l'anglais, je les ai quitté.
Mais revenons à ma vie à Saint Leu la Forêt. Pour échapper à notre promiscuité extrême, ma sœur a trouvé un emploi de  bonne à tout faire  logée dans une famille, elle avait 14 ans. Moi j'ai dû attendre 16 ans. A cette âge une assistante s'est occupée de moi. Elle a fait le nécessaire pour obtenir mon émancipation juridique auprès du tribunal. Ensuite elle m'a trouvé un hébergement dans un foyer de jeunes travailleurs à Epinay sur seine, en banlieue parisienne. J'avais 16 ans. J'étais libre, j'étais sauvé.  J'avais enfin mon espace à moi, des sanitaires à disposition et une vie normale avec d'autres jeunes.
J'ai oublié de le dire, mais pendant toutes ces années, mon père était malade. Il continuait à boire, il criait beaucoup et frappait ma mère. Un voisin intervenait pour le calmer. Ma sœur et moi étions mis à contribution pour acheter son vin. Nous allions dans un supermarché en acheter à la tireuse trois ou quatre litres  à la fois.  Nous vivions sur les allocations familiales et les indemnités de la sécurité sociale. Quelques fois ma mère devait faire des ménages ou demandait de l'argent aux personnes qu'elle connaissait pour manger.
 Dès que nous avons pu nous échapper, nous l'avons fait. Ce serait trop long de détailler ici les fonctionnements des uns et des autres. Je le fais dans les mémoires.
Cependant à la première occasion, ma sœur et moi avons quitté le domicile familial pour faire notre vie, seuls et ailleurs. Nos vies de m..... nous avaient épuisé. C'était bien trop pour des enfants de nos âges. Une fois réinstallés nous avons coupé les ponts. Je n'ai rien su d'eux. Même pas quand ils sont décédés (mon père, ma sœur m'a informé 10 jours après les funérailles). J'ai fait ma vie de mon côté, comme j'ai pu en ramassant les morceaux.
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Mes mémoires sont en cours d'écriture. Je réécris le blog. Déjà 800 pages de fait, mais ce n'est pas fini. Ensuite je solliciterai un correcteur pour reprendre tout ce matériau brut et en faire un livre relié de 400 pages (peut-être).
 
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