Ce que parler veut dire.[blog du 31.10.09]*****

     Un titre qui me plaît. Quelques mots qui ne veulent pas dire grand chose, mais ils me font rêver. Pierre Bourdieu l'a pris pour titre pour un de ses livres. "Ce que parler veut dire" est un cadeau de la langue française. Cela ne veut rien dire réellement ou peut être, "pour dire quelque chose,il faut parler".
    A 16 ans, j'ai pris un nouvel emploi dans une compagnie d'Assurances : Soleil et Aigle. J'étais chercheur. Dans une compagnie d'assurance, dans ces années-là, un chercheur était quelqu'un qui cherchait les contrats d'assurance pour les réunir avec le courrier qui arrivait. En d'autres termes, tous les matins on me donnait des lettres auxquelles il fallait répondre. Mon travail consistait à réunir le dossier du client avec la lettre. Il n'y avait pas d'informatique dans ces années-là.
   Ce travail n'était pas très exaltant mais sans aucun diplôme, je ne pouvais pas prétendre à un autre emploi, j'étais déjà bien content d'avoir obtenu celui-ci. Après deux années, j'ai préféré l'aventure en choisissant de partir pour l'Angleterre. Une nouvelle vie et l'apprentissage de l'anglais. Mes collègues de travail, tous rédacteurs, ont essayé de me dissuader, en m'expliquant que j'avais là une bonne place et mon niveau d'étude n'était pas suffisant pour apprendre une autre langue. Des conseils très raisonnables. La raison n'est jamais bonne conseillère quand on choisi l'aventure. J'ai choisi seul à partir. Les responsables du foyer où j'habitais n'ont pas essayé de m'en dissuader. Les éducateurs savaient mieux que les autres, ce que c'est que "oser" dans la vie. Un petit employé n'ose pas, c'est pour cela qu'il reste petit employé de bureau.
J'ai bien profité de mes quelques années à Londres. En dehors de l'apprentissage de l'anglais, je me suis mis à lire un gros livre sur l'histoire de la philosophie de Jacques Chevalier. Je lisais de 5 à 10 pages par jour. Je ne savais pas que j'avais choisi un livre écrit par le filleul de Maréchal Pétain qui a été ministre de l'Education Nationale en 1941/42. Je ne pouvais pas savoir et internet n'existait pas. C'est comme ça que j'ai commencé à m'instruire. Dans le désordre, mais j'avais personne pour m'aider à m'organiser. J'étais seul. Mon optimisme et ma naïveté m'ont beaucoup aidé. Je n'avais pas de ligne tracé, je faisais tout intuitivement. Je ne m'en suis jamais voulu d'avoir suivi la mauvaise route. Pour moi toutes les expériences avaient la même valeur, elles permettaient de se construire. Je me suis aperçu plus tard que j'étais sartrien : l'existence précède l'essence.
 
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    C'est toujours par hasard que je me suis fait des amis ou des connaissances littéraires. J'ai eu un copain à l'école de service social en 1979. Après avoir travaillé quelques années comme assistant social, il est devenu journaliste et critique littéraire. Je l'écoute maintenant chaque semaine à la radio où il participe à une émission littéraire. Il me fait rêver et j'apprends l'existence d'écrivains. C'est ainsi que j'ai découvert Jim Harrison, célèbre écrivain américain qui a une propriété  dans le Patagonia, dans le sud de l'Arizona, à quelques kilomètres seulement de la frontière mexicaine. J'ai fait le détour jusque là quand j'ai voyagé dans l'Arizona. Je n'ai pas osé frapper à sa porte, même si j'aurais aimé en savoir plus sur lui. Je n'avais lu aucun livre de lui. Il ne fallait pas exagérer... 
    J'ai une tendance à aimer les grands personnages littéraires ou politiques : en vrac, Churchill, Raymond Aron, Jean François Deniau, Marie-Jeanne Durry,  et bien d'autres. Mais rien que des personnages qui ont tracé admirablement leur chemin. Je ne vais pas détailler ici mes grands plaisirs de suivre les cours de Raymond Aron à la Sorbonne dans les années 70. Le Grand Ampli de la Sorbonne était plein à craquer. Nous faisions la queue une demi heure avant le début des conférences pour avoir une bonne place.
 
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